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Cinéastes Invités

Chers lecteurs, chères lectrices

par Maxence Bradley

Artists Institute, c’est plus de 120 personnes qui s’investissent chaque jour pour l’éducation. Photo : Marc-Henry Valmond

Je me présente : Maxence Bradley, producteur et réalisateur de films. Il me fait plaisir aujourd’hui de collaborer avec 24 images, par le biais de ce blogue, afin de partager avec vous quelques articles issus de ma plume, au cours des prochaines semaines. Certains d’entre vous connaissent peut-être déjà un peu mon travail, par l’entremise des projets auxquels j’ai eu la chance de participer par le passé. Notamment, j’ai pu travailler sur des films tels que Next Floor de Denis Villeneuve et Triptyque de Pedro Pires et Robert Lepage, à titre de producteur délégué, mais aussi, de réaliser quelques savoureuses comédies telles que Nostradamos et El Presidente, tournées avec la complicité de différents amis. Je collabore depuis plusieurs années avec l’organisme Prends ça court!, qui fait la promotion des meilleurs courts métrages québécois partout sur la planète et qui ramène le meilleur du court international au Québec. J’aurai la chance de revenir plus en détails sur ces folles aventures dans mes prochains articles, mais dans un premier temps, je vous propose de découvrir ce qui m’occupe en ce moment.

Depuis plus de deux ans, j’ai quitté mon Québec natal afin de venir travailler au Ciné Institute de Jacmel, la seule école de cinéma professionnelle d’Haïti. Fort de mon passé actif dans l’industrie cinématographique québécoise, j’y ai d’abord enseigné la production de films pendant plusieurs mois, avant d’accepter le poste de directeur du Ciné Institute, la division cinéma du campus de l’Artists Institute, qui compte aussi une division d’enregistrement musical et d’ingénierie sonore, l’Audio Institute.

J’ai envie aujourd’hui de vous présenter un peu plus en détail ce que nous accomplissons, mon équipe et moi, jour après jour. D’abord, parce qu’Haïti est un pays magnifique, qui m’a surpris et étonné. Souvent dépeint lors de catastrophes ou de crises politiques, humanitaires ou naturelles, Haïti a souvent mauvaise presse. Pourtant, comme dans beaucoup de pays qui sont aux prises avec différents problèmes sociaux, une génération entière de jeunes adultes et d’étudiants tente d’outrepasser ces conditions difficiles afin de s’accomplir, de s’émanciper et de faire. Dans ce cas-ci, faire des films. C’est cet aspect du Ciné Institute, c’est-à-dire d’avoir mis en place un programme de formation technique et théorique, temps plein, d’une durée de deux ans, qui couvre la plupart des métiers du cinéma, qui m’a impressionné et qui m’impressionne encore à ce jour. Étudier les arts est un acte courageux. Fonder une école de cinéma en Haïti, est aussi un acte téméraire. C’est donc cette rencontre entre une jeunesse allumée, branchée sur le monde, qui possède le désir de s’exprimer et d’exprimer ses idées et une école remplie de professeurs qui partagent leurs expériences et leur savoir-faire avec eux, qui fait du Ciné Institute une institution exceptionnelle.

L’un des principaux objectifs de notre établissement est de participer de toutes les manières possibles au développement des industries créatives en Haïti, en commençant par le commencement, l’éducation et la formation. Je crois fermement que le développement d’un pays, voire même d’une société, commence toujours par l’éducation. Par surcroît, je pense qu’il est essentiel pour une nation, d’investir dans la culture. Évidemment, de nombreux projets d’infrastructures sont aussi primordiaux, comme le soutien du réseau de santé, d’éducation, de transports et d’eau potable. Cependant, et ne l’oublions pas, la culture est elle aussi, essentielle, au Québec comme partout ailleurs. Le cinéma est un vecteur d’identité culturelle, d’unité et de fierté collective. Le cinéma est un puissant vecteur de développement économique. Le cinéma est un moyen de mettre de l’avant certains enjeux majeurs d’une société, de les exposer à sa propre nation, mais aussi aux yeux du monde. Le cinéma est un moyen de se divertir collectivement, ensemble, et d’ainsi participer à la culture collective populaire nationale. C’est dans cette optique que le Ciné Institute donne l’opportunité à des gens d’apprendre à faire des films. Tout d’abord, en transmettant aux étudiants les bases des nombreuses techniques nécessaires à la production d’un film, mais ensuite, en encourageant les étudiants et diplômés à développer leur propre cinématographie nationale, en mettant de l’avant leurs propres idées et leurs propres projets de films. Sans omettre ce côté divertissant ou touchant que permet le cinéma, nous tentons d’encourager et de stimuler la création, en donnant le plus d’outils possible à une génération de cinéastes âgés entre vingt et trente ans, afin qu’ils puissent faire entendre leur voix et leurs valeurs, sur des sujets et des enjeux qui leur sont importants.

Ce très ambitieux projet de formation a débuté il y a un peu plus de dix ans, lors de l’organisation de plusieurs éditions d’un grand festival international de films, ici-même à Jacmel. De fil en aiguille, ce festival s’est transformé en ateliers de formation en cinéma, pour finalement devenir le Ciné Institute sous sa forme actuelle. Afin de partager avec vous le plus efficacement possible cette évolution, je vous invite à regarder ce montage d’une succession de photographies qui résume bien la genèse de cette initiative et son évolution jusqu’à ce jour.

Regardez ce que nous avons fait ces 10 dernières années.

Regardez ce que nous avons fait ces 10 dernières années! from Ciné Institute on Vimeo.

Le Ciné Institute compte maintenant près de 200 diplômés, dont plusieurs sont déjà très actifs, partout au pays. En plus de travailler pour différentes compagnies de production de Port-au-Prince, certains d’entre eux ont fondé leurs propres petites entreprises de production dans différentes zones d’Haïti. Par le biais de stages pour des stations de télévision ou des entreprises de médias, d’autres diplômés acquièrent graduellement l’expérience, les réseaux de contacts et les ressources nécessaires afin de faire évoluer l’industrie des médias. D’autres diplômés vont continuer leurs études dans différents programmes tels que la gestion des entreprises culturelles. Bref, leur passage au Ciné Institute, comme la plupart des écoles de ce monde, leur permet d’acquérir des bases solides sur lesquelles construire leur propre chemin. C’est pas à pas, un film après l’autre, un projet après l’autre, une initiative à la fois, que leur implication se fait sentir à l’échelle nationale.

Ce choix qu’ils ont fait, celui de s’investir dans le milieu du cinéma, a aussi inévitablement influencé leur propre parcours de vie. Afin de vous présenter certains de nos diplômés, mais surtout de vous inviter à voir en quoi ces choix ont pu être significatifs dans leur existence, je vous propose de regarder ce portrait de diplômés, réalisé par la cinéaste Meryam Joober en collaboration avec de nombreux diplômés, lors de son passage à Jacmel l’année dernière.

Artists Institute Graduate Portrait from Ciné Institute on Vimeo.

Les défis à relever afin de dynamiser, de diversifier et de développer les industries créatives en Haïti sont nombreux. Une autre manière d’appréhender la situation, est de constater à quel point beaucoup reste à faire, beaucoup reste à construire. Ce sont les étudiants et diplômés qui jour après jour, donnent un sens à ce que nous accomplissons comme institution, par leurs efforts, leur dévotion et leurs films. Ainsi, je me permets de partager avec vous, en guise de conclusion, quelques œuvres réalisées par des étudiants et étudiantes lors de leurs études.

 

Le Fléau réalisé par Gasner François et Léel Paul (Documentaire)

Piwoulie réalisé par Jeffrey Carl Augustin (Comédie)

 

Citoyens de la rue, réalisé par Eddy Fleursaint (Drame)

 

La veuve réalisé par Wood-Jerry Gabriel (Drame)

 

Citée Troublée réalisé par André-Deave Oxance Decime (Suspense)

 

Je vous invite à en apprendre davantage sur nos activités, en visitant la page Facebook du Ciné Institute

Et à visiter notre chaîne Youtube pour visionner plusieurs autres films et exercices réalisés par des étudiants et diplômés

 

Chers lecteurs, chères lectrices, à très bientôt.


15 mars 2016