ÉPISODE 1 (Avant, l’avant-veille et la veille)
par Annie St-Pierre
Nous en sommes à l’épisode 1 de cette carte blanche. Si vous n’avez pas lu l’Avant-propos, vous risquez fort de ressentir de la confusion. Je vous recommande de commencer au commencement, ici, comme pour le reste de vos projets en général.
Si malgré tout, rien ne vous fait plus plaisir qu’un « recap », disons qu’il y a ici un début d’observations sur le processus créatif, livré en mode documentaire inspiré de la démarche intuitive des automatistes.
ÉPISODE 1 (Avant, l’avant-veille et la veille)
Ça a commencé comme ça :
Puis ça :
À ce moment, j’ai tout de suite ressenti une émotion forte. Comme un grand sarrau blanc qui me pousse à le revêtir, un grand sarrau blanc contre lequel je ne peux pas lutter et qui m’entraine ensuite sur un corridor d’asphalte où au loin, je vois poindre mes buts, entourés de lumière. Helen Faradji me tendait un papier en me demandant d’y écrire mes rêves. En fait, Helen avait utilisé les termes « ton imaginaire » mais le schéma #1 (à ne jamais perdre de vue) lui, disait VOS RÊVES. Ça devait donc être ça. Une émotion forte s’est emparée de moi ; j’ai cru identifier la peur et j’ai voulu reculer.
Mais il était trop tard, j’avais un papier entre les mains (mes RÊVES) et une flèche autoritaire me forçait à aller de l’avant.
Il ne me restait qu’à m’en remettre à l’autorité de l’iconographie pour me laisser guider.
Bingo, la bonne surprise ! Le schéma m’indiquait clairement que la peur arrive beaucoup plus tard dans le processus. Aucune raison de choker, donc. Fallait juste continuer. Même si le propos pertinent tardait à venir à moi et qu’on était la veille de la date convenue.
Le téléphone sonne.
C’est ma mère.
Je sens l’épée de Damoclès (c’est pas comme ça que j’avais imaginer Damo, je vous dirais) au-dessus de ma tête.
Si elle part dans l’énumération des nouvelles locales, je suis faite. Mon imagination va se perdre dans la dramatisation minutieuse des événements racontés et je ne pourrai plus me concentrer sur du contenu PERTINENT:
– Allo ma belle ! Je te dis qu’il m’est arrivé toute une aventure ; j’ai perdu mon cellulaire !
– Mais là tu m’appelles avec.
– Je l’ai retrouvé !
– Maman, je peux tu te rappeler ? J’ai pas beaucoup de temps là.
– Tu travailles encore à c’t’heure-là ?
– Ouin. C’est pas vraiment du travail mais faut que je travaille.
– C’est quoi ?
– Faut que j’écrive une carte blanche…
– Ha ben stress pas ma chouette, t’es assez bonne pour écrire des cartes ; tu me fais pleurer à chaque fois que tu m’en écris une.
– (…)
– Ça va tu ?
– Faque c’est quoi l’histoire de ton cellulaire ?
Après cette conversation je me suis dit qu’atteindre un but (la participation à la carte blanche) c’est déjà super et que je pourrais peut-être laisser tomber mon rêve de pertinence. J’ai envoyé l’AVANT-PROPOS.
Je n’ai pas ressenti de soulagement. Aucune satisfaction du devoir accompli.
Juste un très fort pressentiment que j’étais désormais séquestrée dans le maudit schéma de la route vers mes buts.
Et le bonhomme avec le bat ne me rassurait pas.
1 septembre 2015