Meryl Streep en 10 films
par Pascal Plante
J’ai essayé. Vraiment.
J’ai promis à l’équipe de 24 images que ma dernière entrée de blogue serait autre chose qu’une liste. J’avais même commencé un think piece sur les résolutions cinéphiliques de 2017, mais, force était d’admettre qu’on se retrouvait avec un texte plutôt aride. Je suis probablement plus cynique sur l’état du cinéma que je me plaisais à le croire. Résultat ? J’étais aux prises avec un manifeste tirant dans tous les sens. J’ai abdiqué. J’ai opté pour le plaisir. Une autre liste. Désolé.
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À 67 ans, dans la foulée d’un Golden Globe honorifique et d’un discours engagé, lucide et gracieux (sauf pour les amateurs de MMA), Meryl Streep semble être plus pertinente que jamais. Alors qu’Obama lui décernait la National Medal of Arts en 2010 et la Presidential Medal of Freedom en 2014, Donald Trump semble ambivalent à propos de l’actrice, clamait d’abord l’année dernière qu’il la trouvait excellente, puis cette semaine, sur Twitter (quoi d’autre?) qu’elle était surévaluée. Tiens donc. Essayons de démêler le Donald en quelques chiffres : Meryl Streep, c’est 13 rôles au théâtre et 44 rôles au cinéma sur une carrière s’étalant sur 5 décennies. C’est 157 prix au total (record) sur 409 nominations (record), dont 8 Golden Globes (record) sur 30 nominations (record) et 3 Oscars sur 19 nominations (record). « mais les prix, ce n’est pas tout! ». C’est vrai. Alors, parlons de ses qualités intangibles en quelques faits divers : elle a versé tout son salaire de The Iron Lady au Women’s History Museum; donné tous les vêtements griffés de The Devil Wears Prada à la charité (sauf ses lunettes soleil, pour les ressortir à la blague dans le segment Money, Money, Money de Mamma Mia); s’obstine quasi-systématiquement avec les scénaristes pour enrichir les personnages féminins; se bat ardemment pour l’équité salariale à Hollywood; est impliquée dans de multiples fondations caritatives; et j’en passe.
Si Mary Louise Streep n’a pas le profil d’une candidate étoile pour la présidente du monde, je ne connais rien à rien. J’ai donc décidé de passer en revue-éclair 10 grands films la mettant en vedette. Cependant, j’ai décidé de faire une distinction : je préfère souligner des bons films, et non des films de moindre acabit y présentant malgré tout une grande performance de sa part (à ce sujet, The Devil Wears Prada remporte la palme : un film médiocre, élevé au niveau de plaisir coupable assumé, et ce, grâce à elle, et seulement elle.)
En ordre chronologique. Allons-y.
The Deer Hunter (1978, Michael Cimino)
Après le long-métrage Julia, l’année précédente, cette seconde apparition sur grand écran catapulte la jeune comédienne dans une distribution cinq étoiles. Partageant la vedette avec Robert De Niro, Christopher Walken, et son mari de l’époque John Cazale (mourant du cancer), Meryl Streep confère à son personnage de femme fragile dans une ville minière de la Pennsylvanie toute la force pour la rendre indispensable au récit, et toute la vulnérabilité pour véhiculer, en subtilité, les émotions fortes professées par l’œuvre.
Kramer Vs Kramer (1979, Robert Benton)
Probablement le moins « bon » film dans cette liste, mais on ne peut tout simplement pas le passer sous silence tant il fut une œuvre-phare pour la Meryl Streep en début de carrière qu’elle était. Ce rôle de femme en rupture puis en réconciliation avec son mari (Dustin Hoffmann) lui vaudra d’ailleurs son premier Oscar. Vous savez, celui qu’elle oubliera quelques minutes plus tard dans les toilettes des dames…
Manhattan (1979, Woody Allen)
Bien qu’ayant un rôle de soutien au temps d’écran limité, Meryl Streep trouve le tour d’apporter sa touche personnelle dans le Manhattan de Woody. Ne tentant jamais d’imiter le cinéaste iconoclaste, ou de se confondre avec sa muse de l’époque Diane Keaton, Streep brille en subtilité, et sait trouver le ton juste entre drame et comédie. Oh, et un mot sur Manhattan, tiens, car du long de la carrière de près de 50 films du cinéaste, j’estime qu’à l’exception de Hannah And Her Sisters, Woody Allen n’aura jamais atteint de plus hauts sommets.
Sophie’s Choice (1982, Alan J. Pakula)
Voté à raison sur d’innombrables palmarès des plus grandes prestations de tous les temps, Sophie’s Choice est l’argument massue de la toute-puissance de l’actrice, indubitablement au sommet de son art au début des années 80. Nous tenons aujourd’hui pour acquis que Meryl Streep est un caméléon pouvant imiter tout et tout le monde. À l’époque, c’est cette prestation, à elle seule, qui scelle cette habilité à maîtriser tous les accents dans le béton, et ce, sans jamais compromettre la véracité de l’émotion véhiculée. Sophie’s choice est la parfaite balance entre sincérité émotionnelle et perfection technique.