Peut-être que c’est juste pas bon, aussi

Pour le blogue de 24 images du mois de mai, j’ai décidé de mener une petite enquête : quels sont les aphorismes, les citations, les fragments de sagesse qui habitent le processus créatif des cinéastes et des artisans, artisanes du cinéma ? J’en ai contacté une quarantaine. Certains ont puisé dans le journal de leurs propres pensées sur le métier, d’autres nous livrent des joyaux venant d’artistes, de philosophes ou d’illustres anonymes. Voici ce que j’ai recueilli.

—

Diane Obomsawin

Une phrase m’a beaucoup marqué dans un film de David Lynch.Le film est Inland Empire. On voit la comédienne Laura Dern écroulée sur l’asphalte et du sang lui sort de la bouche. Elle est à côté de deux femmes sans-abri. Une d’elles lui dit avec empathie et sans aucune ironie :

« c’est pas grave, tu es seulement en train de mourir ».

Sinon j’aime bien cette citation de Gertrude Stein : 

« La vie est tellement dangereuse, ce n’est pas la peine d’avoir peur »

Et celle-ci de Einstein :

« L’art est l’intelligence qui s’amuse »

Et enfin celle-ci qui se moque des citations :

« moins tu vas plus vite, plus tu vas plus lentement »

L’image de couverture est tiré du dernier film de Diane, J’aime les filles.

—

Chloé Leriche

« C’est l’amorce, c’est les commencements. Je dors à peine, les idées me foncent dedans. Je marche en parlant, je vois dans le noir, je vois sous la peau, j’écris la nuit le jour, mes ongles poussent. Je ne sais pas dans quel pays je suis ou jusqu’à quand. Tout à coup j’ai quatre mains, dix-huit doigts ou je ne sais pas compter. On invente un film. Un truc improbable. Peut-être un coup de vent. L’autre scénario stagne en attendant mon double, mais j’y retourne bientôt. »

Chloé Leriche

« J’ai vu Uncle Boonmee et ça m’a frappé comme le temps passe et ne revient jamais et je veux vendre ma maison qui ne vaut pas très cher et n’avoir rien, mais avoir tout mon temps et faire des films en marchant dans des pays que je n’ai jamais vu et faire des films comme on écrit juste en dirigeant ma caméra quelque part et faire un pas vers cet endroit quitte à faire deux pas en arrière et recommencer, mais ne pas être obligé de tout écrire et attendre après l’argent parce qu’à ce rythme je ne dirai jamais rien et que rien dire ça donne sans doute des maladies incurables et que faire de l’art ce n’est pas être malade (oui je suis folle, mais je vais bien et tu le comprends parce qu’on est dans le même bateau, non ?) Il faudrait que j’épouse une équipe de cinéma et qu’ensemble nos enfants soient des films et qu’ensemble on se dise “et si on élevait nos enfants dans d’autres pays on leur ferait l’école dehors on aurait pas d’argent, mais on aurait beaucoup d’enfants et ce serait le bonheur” alors avec mon équipe on ferait ces enfants-là on les fabriquerait le jour dans tous ces pays et on n’aurait besoin de rien d’autre vu qu’on serait une famille et parfois on se dirait qu’on est chanceux de former cette famille d’artistes et alors sans doute que quelque chose attirerait notre attention un rayon de soleil ou un son provenant de derrière alors on cesserait de dire des conneries et on brandirait nos fusils prêts à filmer tout ce qui passe comme d’autres sont en vie. »

Chloé Leriche

Pour Chloé, j’ai tout simplement trouvé ces perles sur l’extase de la création sur sa page Facebook. L’image est tirée du film Avant les rues.

—

Stéphane Lafleur

Je ne suis pas très fétichiste de citations et j’ai une très mauvaise mémoire pour celles-ci. La seule que je conserve sur mon babillard me vient de Julien Corriveau (Les Appendices). Je lui racontais que je travaillais sur un scénario compliqué pour lequel j’avais essuyé quelques refus. Il m’a simplement répondu ceci…