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Cinéastes Invités

Quelques notes sur l’ectoplasme et le cinéma winnipégois

par Matthew Rankin

1.) Thomas Glendenning Hamilton (1873-1935) was a Winnipeg school trustee, a Liberal Member of the Manitoba Legislature and a spiritualist photographer of the paranormal. The bereaved and lonesome of the world – including Canadian prime minister and lifelong masturbation enthusiast, William Lyon Mackenzie King – descended upon Hamilton’s enchanted Winnipeg séances to communicate with a deceased relative or pet.

2.) Hamilton became famous throughout the English-speaking world for taking photographs of his spirit medium, Elizabeth Poole, sneezing and vomiting out long, unbridled strands of ectoplasm. He travelled the earth, lecturing to the curious, and even to his fellow men of science, about the factual proof of life after death, using his strange photographs as empirical evidence. Sceptics, such as the illustrious magician Harry Houdini, fiercely denounced spiritualism as a manipulative fraud, but the bereaved of the world wanted only to believe and Hamilton devoted his life assuring them that his Winnipeg ectoplasms were real.

3.) It makes me a little bit sad to think about Dr. Hamilton, caught in an elaborate lie, stuffing chiffon scarves up Mrs. Poole’s nostrils, labouring desperately in his darkroom to credibly aestheticize an untruth. And yet, something richly strange, sublime and ecstatic emerges from his hurried artifice, his weird visions, even his very primitive photographic skill. Really they must be marvelled upon as demented artistic achievements! For me, Winnipeg filmmaking finds its strange genesis in Dr. Hamilton’s enchantingly fraudulent ectoplasms. Indeed, there is a direct line of viscous, paranormal gelatine connecting Mrs. Poole’s nasal cavity to Guy Maddin’s inspired Spiritismes down at DANNY LENNON’S WAY TO GO TEAM PHI CENTRE last summer.

4.)    My favourite Winnipeg filmmaker is the ectoplasmic video artist, Nick Hill (1932-2003). Nick was not an artist by profession, in fact he was an avuncular discount furniture salesman and an inspiring, almost supernatural presence on Winnipeg television while I was growing up. Much like graffiti removal or Normand Lester’s hairpiece, Nick’s body of work might be considered an “unconscious art form.” But, if you look closely, you will see many exhilarating aesthetic decisions at work: the cowboy hat and the sacred mantras, the urgent river of text cascading across the screen, Nick’s ritualistic decision to appear only within a levitating orb of light in the left-hand corner of the screen, like some  kind of occult deity or divine oracle. Here is an introduction to Nick Hill’s Wagnerian Gestamptkunstwerk, and I encourage you, dear viewer, to consider it as an artistic achievement rather than a simple relic of dubious screen capitalism:

Nick Hill: Video Art (1974-1992) from Matthew Rankin on Vimeo.

5.)    Artiste: Atelier national du Manitoba
Titre: “Discount Everything
Technique: Acrylique sur papier sur l’édifice Cliffords, Winnipeg
(2007)

 

Version française du texte
1) Thomas Glendenning Hamilton (1873-1935) était conseiller dans un établissement scolaire de Winnipeg, député libéral à l’assemblée législative du Manitoba et  photographe spirite d’événements paranormaux. Les endeuillés et autres personnes solitaires de ce monde – dont le premier ministre canadien, par ailleurs fervent adepte de la masturbation, William Lyon Mackenzie King – venaient aux séances envoûtantes d’Hamilton à Winnipeg pour communiquer avec un proche ou un animal décédé.

2) Hamilton est devenu célèbre dans tout le monde anglophone pour avoir pris des photos de son médium spirite, Elizabeth Poole, éternuant et vomissant de longs ectoplasmes. Il a voyagé à travers le monde et donné des conférences devant un public de curieux, composé même parfois de certains de ses collègues hommes de science, utilisant ses étranges photographies comme preuves empiriques d’une vie après la mort. De nombreux sceptiques, comme le célèbre magicien Harry Houdini, ont dénoncé avec vigueur le caractère frauduleux et manipulateur du spiritisme mais les endeuillés du monde entier voulaient croire et Hamilton a consacré sa vie à les assurer de l’existence réelle des ectoplasmes de Winnipeg.

3) J’ai parfois un peu de peine lorsque je pense au Dr Hamilton, empêtré dans son mensonge, enfonçant écharpes et chiffons dans les narines de Mme Poole, travaillant sans relâche dans sa chambre noire pour rendre crédible et esthétique sa mystification. Et pourtant, de ses stratagèmes élaborés à la hâte, de ses visions étranges, voire même de ses talents limités de photographe, émergent quelque chose de riche et de mystérieux, de sublime et de délirant. Quelque chose qui doit être vraiment célébré comme un accomplissement artistique de nature démente. Pour moi, la création cinématographique à Winnipeg trouve son étrange origine dans les ectoplasmes frauduleux et enchanteurs du Dr Hamilton. Il y a  sans conteste une filiation directe entre la gélatine visqueuse et paranormale s’échappant des narines de Mme Pool et les séances inspirées de  « spiritisme »,  menées par Guy Maddin l’été dernier au Phi Center sous la houlette de DANNY LENNON ET SON ÉQUIPE « WAY TO GO »

4) Mon cinéaste favori à Winnipeg est l’artiste vidéo ectoplasmique Nick hill (1932-2003). Même s’il n’était pas un artiste professionnel – il était vendeur de meubles usagés -, Nick était extrêmement présent à la télévision et il a représenté pour moi au petit écran une présence inspirante, quasi surnaturelle au fur et à mesure que je grandissais. Comme la moumoute de Normand Lester ou le nettoyage de graffitis, son oeuvre peut être considérée comme « une forme d’art inconsciente ». Mais, à bien y regarder, on peut y voir l’expression de plusieurs choix artistiques stimulants : le chapeau de cowboy et les mantras sacrés, la cascade de textes déferlant à l’écran, sa décision d’apparaître, tel un rituel,  exclusivement dans une sphère de lumière en lévitation dans le coin gauche de l’écran, à la façon d’une divinité occulte ou d’un oracle divin. Voici une introduction à son wagnérien Gestamptkunstwerk et je vous encourage, chers spectateurs, à la considérer non pas comme une simple relique douteuse relevant d’une programmation  capitaliste, mais bien comme un accomplissement de nature artistique.


20 août 2014