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Cinémathèque Québécoise

Un ours polaire grand comme un iceberg

par Marco de Blois

Le film d’animation Giant Bear, de Neil Christopher et Daniel Gies, possède un souffle et une puissance incomparables. Cette réussite attire l’attention sur un récit oral méconnu de la tradition inuite de même que sur le savoir-faire des deux studios coproducteurs : Taqqut Productions, d’Iqaluit (Nunavut), et E.D.Films, de Montréal (Québec).

Dans le froid polaire, un chasseur vient livrer un combat, dont on devine qu’il le souhaite ultime, contre une créature hors du commun : un ours polaire grand comme un iceberg. Relativement court (12 minutes), le film relate les préparatifs jusqu’à l’affrontement. On y compte deux personnages : le chasseur et l’ours, mais le paysage, par son immensité, constitue aussi un personnage, imposant dans son cas, se dressant devant nous avec force et majesté. Ces éléments et la mise en scène donnent à Giant Bear son caractère épique, tandis que la conception sonore, ponctuée par les chants de l’artiste inuite Beatrice Deer, est enveloppante, nourrissant la sensation d’isolement qui nous amène à nous identifier au chasseur. L’habillage painterly ajoute à l’animation 2D et 3D une texture rêche en adéquation avec la nature de cet affrontement et de l’environnement.

D’emblée, le film rappelle un autre grand récit dépeignant le combat de l’être humain contre une menace animale surdimensionnée et terrifiante : Moby Dick. En ce qui concerne le lien qui rattache Giant Bear à l’animation, nous sommes spontanément tentés de faire des rapprochements avec le traitement épique appliqué à certaines adaptations de contes et de légendes dans l’animation russe ou japonaise, par exemple. En effet, cette approche est relativement rare dans l’animation canadienne.

Le film a été un succès de festival : depuis sa première mondiale au festival Regard en 2019, il a été sélectionné à Annecy, à Anima Mundi (Rio de Janeiro et São Paulo), à GLAS (Berkeley), à Fantasia, au Festival de cinéma de la ville de Québec, aux Sommets du cinéma d’animation et dans de nombreuses autres manifestations. La consécration est survenue plus tôt cette année, alors que le film a été couronné du Prix Écran canadien pour le meilleur court métrage d’animation. Il met en évidence le dynamisme de Taqqut Productions et de E.D.Films, deux jeunes boîtes de production.

C’est avec une immense joie que la Cinémathèque québécoise et les Sommets du cinéma d’animation vous offrent la première mondiale « en ligne » de Giant Bear. Le film sera accessible pendant une semaine jusqu’au 26 juillet 2020. Nous vous proposons également ce mot de présentation par la productrice, conseillère culturelle et traductrice Louise Flaherty, qui met le film en contexte.

 


20 juillet 2020