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Critiques

2:37

Murali K. Thalluri

par Helen Faradji

Murali K. Thalluri a 20 ans. Pour créer le mythe, l’histoire raconte que c’est après le suicide d’une de ses amies et sa propre tentative de suicide que sa vocation de cinéaste s’affirma. Le malheur comme moteur, on connaît la chanson. Mais là où elle surprend un peu plus, c’est que le jeune autodidacte australien a non seulement réussi à faire embarquer dans son projet Leslie Shatz, ingénieur du son attitré de Gus Van Sant, mais est encore parvenu à se faufiler dans les rangs d’Un Certain Regard à Cannes en 2006.

  2 :37, c’est donc le titre de ce premier essai. 2 :37 comme l’heure où une adolescente se donne la mort dans les toilettes d’une école. 2 :37 comme le moment où le temps s’arrête. 2 :37 comme l’instant tragique qui ouvre et achève le film.

Littéralement pompé sur Elephant (l’on y suit 6 adolescents dans l’école dans les heures précédant l’événement tragique, en répétant par exemple certaines actions selon les points de vue), 2 :37 fait aussi la compilation des différentes manières de la crème du cinéma mondial face à l’adolescence.

Ainsi, si le documentaire percutant fait son entrée par l’inclusion de quelques interviews en noir et blanc des adolescents en question, le récit se place également volontairement sous l’ombre tutélaire de 3 grands maîtres de l’observation de ces nouvelles pousses bourgeonnantes que sont les ados : Sofia Coppola et son sens inouï de la mélancolie, Larry Clark et ses portraits de groupe à l’innocence en cavale et bien sûr Gus Van Sant et ses mises en scènes humanistes, virtuoses et organiques.

Les références sont énormes. Mais où se situe donc le regard propre de Thalluri? On aimerait le trouver dans cette mise en images douce et fluide, mais celle-ci s’empêtre bien trop vite dans ses tics poseurs. On aimerait encore le dénicher dans cette observation lancinante de ses personnages, mais celle-ci se casse bien vite le nez sur son catalogue façon MTV de tous les problèmes possibles des adolescents. Rajoutons à cela des scènes finales particulièrement éprouvantes et sans pudeur et un suspense d’un goût douteux organisé autour de l’identité de la victime, et nous voilà face à un film dont les promesses s’échouent dans un manichéisme et un sensationnalisme décevants. Au fond reste une question : peut-on vraiment reprocher à quelqu’un de 20 ans de manquer de maturité?


18 octobre 2007