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Critiques

Bluff

Marc-André Lavoie

par Helen Faradji

Marc-André Lavoie et Simon Olivier Fecteau (un ancien du trio comique Chick’n Swell) viennent de réussir un beau coup de bluff. Du moins sur le papier. Monté indépendamment (lire sans soutien des institutions gouvernementales), sorti de nulle part ou presque, leur premier long-métrage, Bluff, film d’ouverture du récent Festival des Films du Monde, a en effet réussi le coup gagnant d’aligner sur la table une véritable suite royale de comédiens québécois. Aux côtés du trop rare au cinéma Alexis Martin tirant peut-être encore plus que les autres son épingle du jeu par le naturel saisissant de sa prestation, le film met ainsi côte à côte un véritable who’s who des acteurs québécois que seul un Denys Arcand, pensait-on, pouvait aujourd’hui réunir : Emmanuel Bilodeau, Isabelle Blais, Raymond Bouchard, Nicolas Canuel, Eve Duranceau, Simon Olivier Fecteau, Rémy Girard, David La Haye, Pierre-François Legendre, Marc Messier, Marie-Laurence Moreau, Gilbert Sicotte, Julie Perreault et Jean-Philippe Pearson. Ouf, n’en jetez plus, la coupe est pleine.

Mais passé le défilé de talents – et rien à dire, ils sont là -, que reste-t-il à Bluff ? Parti d’une bonne idée malgré quelques invraisemblances – un propriétaire et un ouvrier font une découverte dans un logement vide, prétexte à nous raconter les petites histoires des locataires de l’endroit lors des 15 dernières années – le film enchaîne saynètes et anecdotes plutôt dynamiques avant de basculer dans une tonalité globalement plus dramatique et moins maîtrisée. Enlevée, la première partie accumule effets de style tantôt gratuits, tantôt songés, toujours ludiques (le maître mot du film : toujours distraire, surtout ne pas ennuyer) pour laisser finalement place à un dénouement longuet et quelque peu artificiel. Souvent soumises à une réalisation manquant d’ampleur, les situations restent alors cloisonnées, chacune arpentant son petit bonhomme de chemin sans réellement se soucier de ce qui arrive aux autres. Trop de télé, pas assez de cinéma, en somme. Malgré les quelques bonnes idées ci et là, la mise en valeur d’acteurs réussie, et l’astuce générale du tout, ce coup de Bluff sent vraiment trop la poudre aux yeux.


6 septembre 2007