Critiques

L’avocat de la terreur

Barbet Schroeder

par Helen Faradji

Tout accusé a droit à une défense pleine et entière. Le principe est aussi fondamental qu’universel. Et il pourrait légitimer toute la démarche de Me Jacques Vergès, avocat aussi mystérieux que brillant, défenseur du terroriste Carlos, de la militante du FLN Djamila Bouhired ou du boucher de Lyon Klaus Barbie. Certes, on pourrait s’arrêter là et se contenter de penser Vergès comme un farouche partisan de cette norme de droit. Mais le portrait que propose Barbet Schroeder dans L’avocat de la terreur a l’intelligence de pousser plus loin en nous rappelant que Vergès est avant tout un idéologue et que c’est aussi par souci de défendre les « nobles causes » et toutes les libertés qu’il endosse à merveille ce rôle de « salaud lumineux » (du titre d’un de ses livres). Malaise. Car Vergès, même s’il ne l’avouera probablement jamais, fut de tous les combats mais aussi de toutes les magouilles. Auprès des terroristes est-allemands, des militants de la cause palestinienne, jusqu’à son présumé acoquinement avec Pol Pot et sa « disparition » de 1970 à 1978. D’un sourire énigmatique, il balaie du revers de la main toutes supputations et nous laisse aussi fasciné qu’agacé par sa personnalité aux milles contradictions. Comme avec Amin Dada et Bukowski, Schroeder trouve un personnage à la hauteur de son talent de cinéaste tout en s’en servant pour dresser le portrait riche et dense de la carte géo-politique des 50 dernières années. Palpitant.


20 octobre 2007