Le ring
Anaïs Barbeau-Lavalette
par Gilles Marsolais
Premier long métrage de fiction d’Anaïs Barbeau-Lavalette, Le ring porte bien son titre : son filmage nerveux est en parfaite adéquation avec la vie dure et mouvementée de Jessy, un jeune de onze ans issu d’une famille dysfonctionnelle, à la fois rêveur et lucide, dans Hochelaga-Maisonneuve, quartier défavorisé de Montréal. À l’instar de la mise en scène, la caméra colle à ce personnage mû par l’énergie du désespoir, brillamment interprété par le jeune Maxime Desjardins-Tremblay (repêché du documentaire Vues de l’est). Colère et douleur dans le regard, Jessy, nu sur le balcon, crie à son père qui s’éloigne dans la ruelle, dépassé par les événements : « Papa, j’ai faim ! hostie ». Ce raccourci vertigineux constitue l’un des plans les plus justes et les plus authentiques du cinéma québécois. Au contraire des membres de sa famille qui se laissent couler, Jessy, qui vient aussi de porter un jugement d’une terrible lucidité, choisira de se sortir de cette vie de chien par ses propres moyens (l’école, entre autres, n’étant pas du tout adaptée à la rudesse de son milieu ni à ses besoins d’adulte). Évitant aussi bien la lourdeur du symbolisme que la complaisance du misérabilisme, Le ring, écrit par Renée Beaulieu, trouve le ton juste, quasi documentaire, pour regarder là où ça fait mal.
18 octobre 2007