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Critiques

L’heure zéro

Pascal Thomas

par Helen Faradji

Une vénérable maison de campagne aux bords de l’océan. Quelques domestiques farfelus. Une famille en touts points dysfonctionnelle. Et voilà tous les ingrédients en place pour un bon vieux mystère à l’anglaise.

Il n’en fallait en effet pas plus à Pascal Thomas (La Dilettante) pour poursuivre son obsession Agatha Christienne, amorcée en 2005 avec Mon petit doigt m’a dit, et transposer à nouveau l’univers de la Reine du crime dans L’heure zéro. Une poignée de personnages, un quasi huis-clos savamment entretenu et un passionnant mystère aussi épais qu’une soupe de pois. Léger grincement dans l’engrenage toutefois puisque si ici, il s’agira bien évidemment de trouver qui a tué, la première moitié du film sera, elle, consacrée à l’observation minutieuse d’un diabolique suspense placé sous l’interrogation « qui va tuer? ». Comme dans tout bon roman policier, le lecteur-spectateur n’a aucune excuse : tous les éléments lui seront donc donnés pour résoudre l’affaire.

Alors, qui? La vieille tante délicieusement fielleuse? Son ami avocat qui semble en savoir plus qu’il n’en dit? Son neveu, gentleman sportif trop parfait pour être honnête? Sa bru, petit monstre vulgaire et aguicheur? Son ex-bru, madone timide et réservée? Ou encore son aide de maison digne et revêche? L’inspecteur Bataille aura du pain sur la planche.

Quelque part entre littérature et théâtre, entre le Denys Podalydès-Rouletabille du Mystère de la chambre jaune et l’ironie grinçante d’un Chabrol ou d’un Hitchcock, Pascal Thomas tisse ainsi les fils d’un véritable jeu de massacre riche et entraînant avec une élégance et un charme délicieusement désuets. Les acteurs s’amusent comme des fous (exception faite d’une Laura Smet trop hystérique pour convaincre), les dialogues sont pleins d’esprit et la photographie impeccable. Le plaisir est là, pas de doute. Malin, parfois drôle, toujours manipulateur, L’heure zéro qui ne prétend qu’à être exactement ce qu’il est, soit un savoureux divertissement, a définitivement de quoi réjouir.


10 juillet 2008