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Critiques

Religulous

Larry Charles

par Helen Faradji

Il y a des films comme ça, comme Religulous, qu’on forcerait bien les électeurs américains et canadiens, les fanatiques et autres fous de Dieux, ou encore tous ceux qui pensent sincèrement que tout est né d’un serpent et d’une pomme, à voir. Mais le cinéma ne se force pas, il est affaire de plaisir et Religulous risque bien de rater sa cible.

De quoi parle-t-on au juste? D’une charge en bonne et due forme contre la religion, ou plus précisément contre le christianisme, le judaïsme et l’islam, menée par l’un des comiques les plus virulents de son temps, Bill Maher. Aidé à la caméra par Larry Charles (déjà réalisateur de l’impayable Borat), qui a visiblement bien relu son Eisenstein 101, le comédien ment pourtant sur la marchandise. Sa charge, dit-il, ne vise pas à moquer les croyants et la foi, mais plutôt à installer le doute dans l’esprit de tous pour mieux nous rendre notre esprit critique. Du Socrate pour tous, en quelque sorte. Mais le cheminement déraille bien vite : en visitant chapelles et autres églises, leaders religieux et autres pieux sages, Maher ne se prive en effet pas de leur mettre sous le nez toutes les contradictions des préceptes religieux. Souvent, c’est hilarant. D’autant que Charles explicite les attaques de son compère par des contrepoints visuels souvent féroces. Mais parfois, c’est aussi condescendant. Gênant, quand le dialogue essaye de naître.

Et c’est probablement là que le vrai noeœud du problème se situe. Aucun croyant digne de ce nom ne pourra regarder ce Religulous sans se sentir profondément offensé. C’est une garantie. Car Maher y va, et sans gants s’il vous plaît, pour démolir une à une toutes les grandes convictions des différentes religions. Les répliques sont assurées, le ton acerbe, la moquerie ironique incessante. Pour tous ceux qui sont déjà convaincus de la dangerosité profonde de l’introduction du religieux dans le discours politique ou de l’intolérance à laquelle mène parfois (souvent) la croyance, Religulous est du pain béni. Une bouffée d’air dans un climat délétère où règne en maître le religieusement correct. Une dose d’impertinence bienvenue et salutaire qui donnerait presque envie de hurler alléluia à pleins poumons en s’approchant de la transe. Malheureusement, à ne prêcher que des convaincus, c’est aussi la bonne parole qui s’égare.


2 octobre 2008