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Critiques

Toy Story 3

Lee Unkrich

par Marcel Jean

On oublie souvent que Toy Story, réalisé par John Lasseter en 1995, est l’une des œuvres marquantes du cinéma américain récent, d’ailleurs classées par l’American Film Institute (AFI) dans sa liste des 100 plus grands films américains de tous les temps. C’est en effet avec ce film que Lasseter, déjà connu pour deux courts métrages importants (Luxo jr. et Tin Toy), a démontré que l’animation par ordinateur avait un avenir à la fois commercial et artistique, ouvrant ainsi la voie aux développements que l’on a connus au cours des 15 dernières années: remplacement du dessin animé traditionnel par l’animation par ordinateur comme base technique de l’industrie, prolifération des effets spéciaux numériques dans le cinéma commercial (voir à cet effet le cas de Mars Attacks!, où les effets devaient d’abord être réalisés en stop motion, c’est-à-dire avec des marionnettes), etc…

La sortie récente du troisième volet des aventures de Woody le cowboy et de l’astronaute Buzz Lightyear nous rappelle l’énorme potentiel comique des personnages et de l’univers créés par Lasseter. Avec Lee Unkrich (déjà coréalisateur de Toy Story 2, de Monsters Inc. et de Finding Nemo) cette fois seul aux commandes de ce Toy Story 3, la célèbre franchise est entre de bonnes mains. Ainsi, le film progresse habilement entre une intrigue destinée à toute la famille et une série de bons mots et de situations qui ont tout pour plaire aux adultes.

Que la recette soit éprouvée et que ce troisième épisode ne la renouvelle guère, voilà une évidence qui tend à rendre caduc l’exercice critique. Toy Story 3 ne nous apprend rien de neuf sur la série et le fait qu’il soit un peu moins bien que le premier, mais un peu mieux que le deuxième ne justifie pas, en soit, de longs développements. Que Barbie ait cette fois-ci trouvé son Ken, que les héros soient ici opposés à un terrible ourson rose et sentant la fraise nommé Lotso, voilà qui ne justifie pas non plus qu’on noircisse des pages.

En fait, s’il y a un aspect sur lequel le film mérite qu’on s’arrête, c’est la question du relief (la fameuse 3D), qui fait évidemment partie de la panoplie promotionnelle du film, mais qui n’y apporte strictement rien sur le plan esthétique, au point où l’on peut affirmer que cela ne vaut définitivement pas la peine d’endurer pendant 103 minutes les affreuses lunettes pour si peu. Étonnant, donc, que cette dimension ait été à ce point négligée par un studio à la réputation avant-gardiste, surtout après les expériences convaincantes d’Avatar et d’Alice in Wonderland. On pourrait donc choisir sans regret la version « plane » du film si ce n’était du court métrage que Pixar a programmé en prélude à Toy Story 3. D’une durée de six minutes, Day & Night de Teddy Newton propose en effet une utilisation pleine d’esprit et de subtilités de la technologie 3D, alors que deux personnages en silhouettes inversées agissent comme des percées ouvrant sur des paysages en constante transformation (et reflétant leur état d’esprit). Vif, original, jouant avec brio sur l’opposition entre le plat et la troisième dimension, Day & Night est de loin le meilleur court métrage produit par Pixar depuis que Lasseter a laissé à d’autres ce secteur d’activités. En complément de programme, ce court film insuffle une dose d’originalité à une séance qui est par ailleurs certes divertissante, mais trop prévisible.

 


24 juin 2010