Un loup derrière la porte
Fernando Coimbra
par Céline Gobert
Dans le tumulte de Rio de Janeiro, la petite Clara a disparu. Ni sa mère ni son père ne sont venus la chercher à l’école. La police soupçonne rapidement la jeune maîtresse du mari, qui clame son innocence. Où est donc passée la fillette ? C’est sur ce mystère et ce point d’interrogation que débute l’enquête policière qu’illustre ce thriller brésilien fiévreux récompensé entres autres au Festival du Cinema Latino de Montréal et au Festival International du Film de Rio. Avant d’en arriver à sa conclusion (glaçante), Fernando Coimbra – dont c’est le premier long-métrage – opte pour une narration en puzzle, flashbacks et divers points de vue : Bernardo, le père, racontera d’abord sa version des faits, suivie de celle de Rosa, jeune femme de 25 ans avec qui il trompe sa femme Sylvia.
Au premier coup d’oeil, le film – bien qu’intéressant dans ce qu’il dépeint des rapports hommes/femmes au Brésil – n’apparaît que comme une simple et banale histoire d’adultère qui tourne mal dès lors que l’homme se lasse et se fait lâche. Pendant ce temps, Coimbra met en place une lente mécanique psychologique ayant pour but de répondre aux zones d’ombres des faits divers : qu’est-ce qui pousse des gens normaux à commettre des crimes passionnels ? Par quel long processus en arrive-t-on à basculer dans l’horreur ?
En parallèle à cette tragédie contemporaine présentant l’adultère et ses conséquences, quelques vérités (davantage des constats que des critiques d’ailleurs…) sur la société et les mentalités brésiliennes apparaissent : les rapports amoureux demeurent encore très empreints de machisme (le mari traite aussi mal sa femme que sa maîtresse!), les mœurs restent influencées par la forte religiosité du pays (voir comment la maîtresse est considérée comme la pire des pécheresses par tous les hommes du récit….), et, les armes à feu sont facilement accessibles au commun des mortels.
Le plus intéressant est le soin porté par le réalisateur à l’atmosphère agitée du récit. L’ambiance de tromperie, véritablement anxiogène, laisse constamment planer une menace sur les personnages. Pour cause, ce « loup derrière la porte » représente surtout l’idée d’un mal (banal) qui s’insinue, lové dans les mensonges. Avec son scénario bavard (tout le monde y parle beaucoup et très vite), ses zooms sur des visages en sueur et ses allures de soap opera caniculaire, le film pousse constamment le spectateur à épouser la cadence de ses protagonistes-animaux, prédateurs (ou proies, selon le point de vue) dirigés par leurs pulsions destructrices – séduction, possession, dévoration.
La bande-annonce d’Un loup derrière la porte
31 juillet 2014