Philippe Lesage
par Gérard Grugeau
Vous avez étudié en littérature et The Catcher in the Rye, qui est un classique de la littérature américaine, a son importance dans votre dernier film. Après plusieurs documentaires, vous avez dit avoir éprouvé le besoin de vous consacrer à l’écriture fictionnelle pour vous rapprocher de vous-même. Genèse, comme Les démons auparavant, est donc né de cette envie ?
C’était un besoin de revenir à l’écriture qui a toujours fait partie de ma vie. Dans le documentaire, on écrit au montage, mais j’étais insatisfait. J’avais l’impression qu’une partie de moi ne pouvait pas vraiment s’exprimer. J’aime beaucoup le moment de l’écriture, me retrouver dans l’intériorité, la solitude que cette étape du processus de création appelle. J’écris n’importe où, surtout dans le bruit, les cafés, les hôtels. Cette plongée intérieure, cette bulle que j’arrive à créer, me plait énormément. Plus jeune, j’ai voulu étudier à McGill, je trouvais que c’était le plus beau campus de Montréal. J’étais très attiré, envouté par la littérature américaine à cette époque-là, que ce soit J. D. Salinger, William Faulkner ou Raymond Carver. Je prenais des cours de création littéraire avec Yvon Rivard, qui a été pour moi un professeur déterminant. J’écrivais des nouvelles dans son cours. C’était une époque charnière. La littérature occupait alors presque plus de place que le cinéma dans ma vie.
Votre cinéma est souvent référentiel. On pourrait citer la séquence de la fête foraine des Démons qui, pour moi, rappelle Stranger on a Train d’Hitchcock, la scène de danse familiale en écho à Cria Cuervos de Carlos Saura ou ici, dans Genèse, un clin d’œil à Zéro de conduite de Jean Vigo, avec la bataille d’oreillers dans le dortoir. Ces filiations sont-elles présentes très tôt dans le processus d’écriture ?
Absolument. La dernière scène dans Les Démons est très inspirée des Fraises sauvages de Bergman, quand Victor Sjöstrom envoie la main à ses parents sur le quai. J’ai refait à peu près le même plan. J’aime me sentir entouré de fantômes dans la création. Ce qui m’étonne, c’est que souvent, les gens ne les voient pas. J’ai suffisamment confiance en mon parcours pour assumer mes influences. Genèse est pour moi la quintessence de mon travail. Le film porte ma voix de façon très forte et on y retrouve des éléments de tout mon cinéma.
Vous aviez écrit un beau texte sur Maurice Pialat lors du cycle que vous avez présenté à la Cinémathèque en 2015. Vous y fustigiez la dictature du scénario et rappeliez le désir de Pialat qui était de « dissoudre la mécanique narrative ». Comment, de votre côté, arrivez-vous à trouver cet espace de liberté dans l’écriture pour échapper aux conventions du récit ?
Je m’ennuie souvent comme spectateur au cinéma. D’où mon malin plaisir de jouer avec la structure du film. Dans Les démons, je changeais de point de vue pour suivre le personnage du jeune pédophile avant de revenir au personnage de Félix. Dans Genèse, j’ai voulu une finale audacieuse, j’essaie de briser les codes. Mais j’avance de façon très intuitive quand j’écris. Il faut que tout se lie de façon organique. S’inspirer de sa propre vie est un bon moyen d’échapper au moule que l’on veut nous imposer. Plus on colle à sa propre existence et à des éléments qui nous ont été racontés par notre entourage, plus la scène devient originale en soi. Car c’est là que la singularité de la vie avec tout ce qu’elle a de surprenante, de spectaculaire, de mystérieuse, trouve son chemin. C’est aussi une façon de ne pas répéter ce qui a déjà été fait et d’accéder à une plus grande authenticité. Il y a la tyrannie de la fiction, mais il y a aussi la tyrannie de l’imagination. Pour moi, c’est un plus grand défi d’imaginer le vrai.
Il y a une logique souterraine de la vie qui vient avec cet abandon dans l’écriture ?
Oui, et c’est ce que je recherche. Il y a aussi quelque chose d’inachevé dans la vraie vie. Il ne faut pas sentir les intentions, qui sont multiples. Il faut que le réalisateur, les artisans du film et le spectateur entrent dans un vrai dialogue. Le spectateur complète le film avec sa propre sensibilité. Comme en littérature qui est un art qui interpelle notre créativité. J’aime bien le côté elliptique des choses, je ne fais jamais de plans de transition, ce qu’on appelle dans le milieu « les poignées de porte ». Chacune des scènes doit porter sa propre dramaturgie et être complète en soi. J’évite les scènes explicatives.
Genèse a une structure originale en 3 actes, on pourrait dire, puisqu’on y suit deux personnages, Charlotte et Guillaume dont les trajectoires s’entrelacent dans les deux tiers du film, avant de basculer dans une sorte d’épilogue inattendu où l’on retrouve Félix, le personnage des Démons. Cela crée une césure brutale qui vient enrichir le récit, autrement.
Je ne cherche pas à briser les codes narratifs à tout prix. J’aime beaucoup la phrase de Jean-Jacques Rousseau reprise par Robert Bresson : « Je n’essaie pas de faire comme les autres, ni autrement. » Je trouve que ce que je fais me ressemble. Oui, il y a une prise de risque dans cette finale, mais elle est sincère. J’aime les cinéastes chez qui on sent une immense liberté, ceux qui dérogent aux règles. Je pense par exemple à Tropical Malady de Apichatpong Weerasethakul avec son récit scindé en deux. Les deux parties forment un tout des plus stimulant. À vrai dire, je ne me souviens plus quand l’idée de cette rupture dans la structure est arrivée dans le processus d’écriture, mais pour moi, c’était une variation sur un même thème et une finale certes douce-amère, mais aussi très lumineuse. Cela me semblait riche en soi de revenir à la genèse des premiers émois amoureux quand tenir la main de quelqu’un devient la fin du monde. Cette finale peut générer un décrochage chez certains spectateurs, mais le tout est de faire confiance à cette nouvelle histoire. On dirait que l’on accepte plus facilement ce genre de digression en littérature où l’on peut changer de narrateur en plein milieu d’un roman.
Dans vos fictions, on a l’impression que la dernière scène est nostalgique d’une forme de paradis perdu, même si l’angoisse est toujours là sous-jacente. Félix salue ses parents au bout du quai dans Les démons dans une séquence de bonheur aussi idyllique que fugace. Et dans Genèse, le cadre du camp de vacances est le lieu de l’innocence d’un premier amour, un moment de bonheur pur, toutefois contrarié, qui se teinte pour le spectateur d’une coloration d’autant plus douce-amère qu’il vient de suivre les affres amoureux de Charlotte et de Guillaume.
Paradis perdu, peut-être. Mais la scène est douce-amère parce que les deux personnages se rencontrent sans vraiment se rencontrer. Cette cohabitation au sein d’un groupe donne lieu à des moments d’une grande intensité ; on quitte les autres, la mort dans l’âme. Et dans ces années-là, on ne maintenait pas le contact comme aujourd’hui avec les téléphones portables et les réseaux sociaux. On apprenait le deuil et ces séparations s’accompagnaient d’une profonde tristesse. J’ai vécu cette histoire et si j’avais eu le courage d’embrasser la jeune fille à l’époque, peut-être que ma vie aurait été totalement différente.
À cause de l’âge du jeune Félix, Les démons était plus en lien avec une forme d’intériorité alors que Genèse revendique une parole parfois exubérante, tout du moins dans le cas de Guillaume. Le personnage de Charlotte, lui, témoigne d’une connaissance très fine de la psyché d’une adolescente.
Ce sont des adolescents avec une vie intérieure très riche. Tarkovski disait qu’il aimait les personnages qui ont une tension statique parce que cela donne une acuité à leur passion. Je préfère ça à l’idée de personnages qui vont se transformer. La transformation, c’est moins intéressant, c’est ce que les ouvrages de scénarisation veulent nous vendre. L’intériorité est liée à une tension existentielle, à des conflits intérieurs qu’il faut aller chercher. Je valorise beaucoup cette vie intérieure parce qu’aujourd’hui, on est constamment sollicité par une sur-utilisation d’objets qui nous sont extérieurs, d’où notre dépendance au téléphone, aux messages et aux réseaux sociaux. Je veux retrouver un monde sans tout cet arsenal, c’est peut-être là aussi une forme de paradis perdu. Les moments où l’on ne fait rien, où l’on a une plongée introspective, sont de plus en plus rares dans nos vies. Théodore Pellerin (Guillaume) sortait de Chien de garde, le film de Sophie Dupuis, un film où l’exubérance était très présente. Au-delà du côté clown de la classe au collège, je voulais aller chercher chez lui les moments d’intériorité où le personnage devient attachant, quand il lit par exemple. Mes deux personnages ont une tension intérieure qui les anime et les propulse. C’est ça qui m’intéresse avant tout. Charlotte traverse une période où elle est malmenée et déçue par les hommes autour d’elle. Les garçons ne lui donnent pas la place nécessaire pour qu’elle s’émancipe. On cherche toujours à l’étouffer. C’est un pattern courant que le film dénonce au passage. Je me suis rendu compte très tard dans ma vie que bien des femmes font face à de tels comportements qui peuvent aller jusqu’à l’agression sexuelle. J’étais aveuglé face à ce phénomène alors qu’il y a une menace constante qui est là, une sorte de banalité du mal, une forme de déni chez l’agresseur. Marie-Ève Barbeau, qui était assistante à la mise en scène sur le tournage, m’a fait des suggestions intéressantes à cet égard.
Dans vos films, fictions et documentaires confondus, vous cherchez à saisir des états propres aux différents âges de la vie. Dans les scènes de bar de Genèse, les conversations n’ont somme toute aucune importance, c’est la présence des corps dans l’espace qui prime. Quand vous ouvrez Pourrons-nous vivre ensemble sur cette classe à l’université au son d’une musique classique, le spectateur se retrouve dans ces corps d’étudiants que vous isolez dans le cadre. C’est un état que l’on reconnait d’emblée. Est-ce pour vous un gage d’authenticité que de travailler dans ce sens ?
Oui, dans les scènes de bar de Genèse, c’est le documentariste en moi qui refait surface. Ces séquences sont à peine dialoguées. J’essaie d’aller chercher une énergie authentique. Dans mon dernier documentaire Laylou, je voulais avoir accès à la chambre des filles, si l’on peut dire. Et l’idée était de saisir quelque chose de ces étés d’ennui, de cette période qui suit la graduation et où il n’arrive rien. C’était uniquement un film d’ambiances et d’atmosphère.
Dans tous vos films, la musique, et peut-être encore plus dans Genèse, est très présente. Elle est ici un élément diégétique structurant qui vient lier les parcours de Charlotte et de Guillaume, et même de Félix à la toute fin, avec la chanson à répondre du début qui est reprise et assure la transition. Il y a aussi une chanson thème (Outside des Tops) qui revient comme un leitmotiv. Il faut dire que nous sommes là dans un âge où la musique est très liée aux histoires d’amour.
Exactement, quand on est adolescent, la musique est indissociable des moments d’émotion très forts que nous traversons. Chacun construit la bande sonore de sa propre vie. C’est extrêmement puissant, cet effet-là. Et à l’adolescence, c’est comme un passage obligé, on éprouve un certain plaisir à mettre du sel sur nos plaies. On se complait à écouter des chansons mélancoliques. Je voulais que Genèse ait un côté fresque musicale. Un de mes plus grands plaisirs d’écriture est d’imaginer une musique pour une scène et de me rendre compte, plus tard au montage, que la magie opère. J’aime aussi mélanger des musiques de toutes les époques. Pour moi, la musique est plus qu’une pause, plus qu’une respiration. C’est une façon de conférer un caractère épique au réel, et de favoriser la contemplation. Je suis loin de faire un cinéma naturaliste et je ne suis pas non plus dans le réalisme social ; je suis plus un impressionniste qui va exploiter la musique, les couleurs, les textures. Quand Théodore court sur le terrain de sport pendant une minute et demie, cela crée un moment d’élévation. En écoutant de la musique, on va chercher cette intériorité que je chéris, des sons sur lesquels on plaque nos propres images, nos propres histoires. La musique donne une élévation à nos souvenirs et le cinéma permet de retrouver ça.
Vous utilisez beaucoup le plan-séquence. Est-ce pour laisser les comédiens libres de leurs mouvements dans le cadre ? Et aussi éviter le découpage ?
Je fais beaucoup de prises, mais les comédiens – qui s’ennuient parfois très vite – apprécient que l’on ne soit pas dans la routine du champ-contrechamp. Le plan-séquence les garde sur le qui-vive. J’interdis au directeur photo de mettre des marques au sol pour les déplacements. Je veux laisser une marge de liberté aux acteurs. Je veux aller chercher un jeu naturel, loin de ce que l’on entend souvent à la télévision. Et je n’aime pas découper. D’où l’emploi du zoom dans Genèse. J’aime beaucoup le cinéma du Nouvel Hollywood des années 1970 qui utilisait abondamment le zoom. C’est moi qui opère souvent la caméra dans ces moments-là. Avec le mouvement des corps, cela permet d’accéder à une chorégraphie plus naturelle des choses. Comme si le cadre rendait à la vie ce côté plus spectaculaire, plus épique que j’ai évoqué tout à l’heure. C’est comme un ballet qui rend compte de la beauté associée à la banalité du quotidien.
Dans Les démons, le travelling était une figure très présente, notamment dans les séquences de la piscine qui généraient une angoisse à la Michael Haneke. Je me souviens qu’André Téchiné a commencé par faire un cinéma qui s’interrogeait sur ses propres codes avant d’en venir à un cinéma moins réflexif. Avez-vous l’impression que, pour vous, quelque chose s’est délié sur le tournage de Genèse ?
On cherche sans doute davantage à impressionner quand on fait un premier film. On met une sorte de distance et on sentait peut-être plus la caméra. J’essaie toujours de trouver la façon la plus stimulante et la plus simple de faire la scène. L’idée du travelling sur la piscine est une idée qui m’est venue en cours de tournage. Peut-être y avait-il quelque chose d’un peu ostentatoire, même si je suis plutôt satisfait de ces séquences. Je recherche plus la simplicité aujourd’hui. Je trouve que la dernière partie de Genèse est filmée et montée dans cet esprit-là. Mais c’est un film plus bavard aussi. Dans la scène de séparation entre Félix et Béatrice quand ils se serrent pour se dire au revoir, il y a un zoom presque maladroit… je l’ai gardé car il sert complètement l’émotion du moment. On a refait la scène plusieurs fois, mais ça ne fonctionnait pas.
Vous faites de nombreuses prises sur le tournage pour aller capter ce qu’il y a de plus naturel dans le jeu et la présence des acteurs. Vous guettez le moment d’abandon ?
Oui, c’est vraiment ça. À l’usure, on finit par arriver à quelque chose de plus naturel. Dès que c’est trop projeté ou que l’on sent une affectation, ou que j’entends le ton « téléroman », je décroche. En regardant les rushs, on voit qu’il y a tout un monde entre la première et la dernière prise. Et comme je fais des plans-séquences, c’est aussi un peu plus compliqué. Par contre, il y a des scènes plus chargées émotivement, celles que le comédien appréhende notamment. Dans ces cas-là, les premières prises sont toujours les meilleures. Comme l’acteur est sous tension, il y a quelque chose de fort qui est là et qu’il faut saisir, parce ça s’essouffle très rapidement. C’est un mélange des deux. Je pense que plus on est préparé et moins on laisse les choses au hasard, plus on permet au hasard de se manifester. Les comédiens et les techniciens sont pour moi des collaborateurs. J’aime que leur créativité rencontre la mienne. Paul Ahmarani a beaucoup ajouté au personnage du professeur. Il a compris tout de suite l’essence du rôle. Quant à Noée Abita, elle a une présence très forte, très naturelle. J’avais peur que la flamboyance de Théodore ne lui fasse de l’ombre, mais elle a vite trouvé ses marques. Le casting, c’est 50% de mon travail. Je le fais moi-même avec une équipe. Je ne passe pas par des agences qui organisent les choses. Je fais appel aux agents d’artistes et je vois des centaines de personnes. Même chose pour les repérages. Le film a été tourné dans quatre collèges différents, faute de trouver l’école idéale.
Dans Zéro de conduite de Jean Vigo que vous citez, la révolte des écoliers contre l’institution est collective, alors que dans Genèse, la révolte de Guillaume, amoureux transi et éconduit, est individuelle. Il devra faire face, seul, à l’humiliation et la cruauté, qui sont des thèmes récurrents dans votre cinéma.
Je suis parfois moi-même surpris de la dureté du monde que j’exprime dans mes films. Je vois mes personnages comme de grands héros romantiques qui se lancent dans le monde sans se protéger. J’aime les héros à la Dostoïevski, qui ont un mépris pour les gens qui sont dans la retenue. Cette littérature valorise celui qui aime et qui va au bout de sa passion. Dans Genèse, Guillaume et Charlotte ne se protègent pas et la société est impitoyable envers eux. En ce moment, ça vient de tous les côtés, aussi bien de la gauche que de la droite. La société est très dure envers les gens qui sont honnêtes. On n’a plus le droit de dire vraiment ce que l’on pense. Et assumer ses passions, c’est rencontrer des obstacles. L’authenticité dérange, la société est hypocrite. Guillaume reçoit un soutien momentané et après, ça se retourne contre lui. Mais mes personnages ne sont pas des victimes, je sais qu’ils vont se redresser. Ils sont combattifs. Je ne voulais pas tomber dans l’hyper victimisation avec Charlotte, même si elle traverse des choses difficiles. Elle est forte et Noée, la comédienne, la voyait aussi comme ça. On se reconnait dans ces parcours amoureux-là. Je me reconnais d’ailleurs autant dans Guillaume que dans Charlotte. Mes personnages mangent des coups, mais ils sont intègres et ils se relèvent. C’est ce qui les rend digne. Ils continuent à aimer sans se méfier. Il n’y a pas d‘âge pour se tromper en amour et vivre des peines. On sait que l’on peut se faire mal, mas on y va. Je n’aime pas les calculs, le repli ou l’apitoiement sur soi. Guillaume a le courage de ses idées et j’ai un grand respect pour ça.
Dans le montage, recherchez-vous une sorte d’effacement de la mise en scène ?
Le film doit avoir avant tout son propre rythme. Il faut trouver le battement approprié. Nos coeurs battent à des cadences différentes. C’est la même chose pour un film. Un rythme finit par s’imposer, mais c’est un rythme qui n’a rien à voir avec l’efficacité aliénante que l’on retrouve souvent au cinéma. Comme Genèse est un film plus dialogué, il fallait être un peu plus attentif à ce battement intérieur et éviter la complaisance. Je dois dire aussi que j’ai eu 42 jours de tournage, ce qui est un grand luxe pour un réalisateur, surtout au Québec. Le film est différent du scénario. Par exemple, la scène de l’entrainement où l’on voit Guillaume courir sur la piste d’athlétisme : j’ai voulu au montage donner une amplitude à la séquence, en faire un moment de cinéma en soi. Au départ, j’avais prévu une séquence un peu rigolote autour du sport, puis j’ai décidé d’aller vers une forme de tristesse. Ça me permettait aussi d’établir des parallèles entre Guillaume et Charlotte, d’utiliser la chanson comme lien entre les deux. Mais il faut faire attention au montage. Avec Mathieu Bouchard-Malo, on s’attache parfois à des choses, pas toujours les mêmes d’ailleurs. Pour la finale du film notamment, il n’y avait pratiquement rien à monter, les plans s’appelaient naturellement, la magie était présente. Mais certaines personnes à qui j’ai montré le film trouvaient ça trop long. On a finalement enlevé dix minutes et c’était la chose à faire.
Envisagez-vous une suite à cette partie plus ou moins autobiographique de votre travail ?
Mon prochain film sera une comédie dramatique librement inspirée d’une histoire qui est arrivée à mon frère. J’explorerai le monde des adultes cette fois-ci, des adultes vus à travers le regard d’un jeune de 17-18 ans. Ce sera aussi une réflexion sur le mythe de la masculinité, l’histoire d’un garçon qui découvre soudain son idole sous un autre jour.
Entretien réalisé le 12 février 2019
14 mars 2019